Le Père Joseph CARRIÉ,
décédé à Misserghin, le 5 février 1907,
à l'âge de 32 ans.


C'est à Laissac, dans le diocèse de Rodez, que naquit Joseph-Louis Carrié, le 15 novembre 1874. Il était le onzième enfant d'honorables cultivateurs, excellents chrétiens. Dès son jeune âge, ses attraits le portaient vers les missions apostoliques. Dans ce dessein, il entra au petit scolasticat de Cellule, le 8 octobre 1888, pour commencer ses études latines. Après un passage au collège de Merville, il entra au grand scolasticat en septembre 1895, mais il dû partir pour un an, au service militaire.

De retour à Chevilly, il y commence son noviciat en novembre 1896. Après sa profession (2 janvier 1898), il continua ses études théologiques, fut ordonné prêtre le 28 octobre 1900 et fit sa Consécration à l'apostolat le 11 juillet 1901.

Le P. Carrié fut envoyé au Congo français. Les lignes suivantes que nous a adressées Mgr Dérouet, en apprenant son décès, sont un précieux témoignage :

« Arrivé dans la mission en même temps que le P. Pérès, qui ne devait, lui aussi, faire que passer dans le vicariat, le P. Carrié fut employé par Mgr Carrie à l'œuvre des enfants de Loango. Missionnaire pieux et zélé, il se donna tout entier à ses chers petits Noirs ; et il eut le bonheur assez rare de s'en faire également aimer et respecter. C'est que sa bonté, qui était sincère, était tempérée par une juste sévérité. Il aimait sans faiblesse, et s'occupait à chaque instant de l'âme de ses enfants. Souvent il les recevait en particulier, les encourageait et leur adressait quelques-unes de ces bonnes paroles dont ils ne perdront jamais le souvenir. On sentait vibrer dans ces paternelles admonestations l'âme du prêtre, le cœur de l'apôtre. Mais c'était surtout à l'approche des cérémonies de baptêmes d'adultes, des premières communions et des confirmations, que se manifestait le zèle du P. Carrié. Il n'épargnait alors ni peine ni fatigue, pour bien préparer ses chers enfants.

« Le P. Carrié s'était mis avec ardeur à l'étude de la langue indigène, car il rêvait d'apostolat et brûlait du désir d'aller catéchiser les indigènes chez eux. Déjà il avait commencé ce genre de ministère ; et les premiers résultats qu'il avait obtenus faisaient présager, pour cet ardent ouvrier, une abondante moisson d'âmes. Dieu ne lui en donna pas le temps. Le cher Père fut arrêté au moment ou il allait commencer a récolter. Vaincu par la terrible tuberculose, il dut bientôt garder la chambre et renoncer aux courses apostoliques, qu'il affectionnait tant. Nous pensâmes d'abord que le malade se trouverait bien de l'air et du bon régime de Mayumba. L'expérience fut désastreuse. Après avoir passé quelques mois dans cette station comme directeur du séminaire, le P. Carrié devint bientôt incapable de tout travail. Il revint alors à Loango, d'où il rentra en France, après avoir exprimé le désir de rester toujours en relations avec ses confrères et les enfants qu'il avait tant aimés. Depuis lors, en effet, nous entretenions avec lui une correspondance régulière. Le bon père continuait a suivre avec intérêt les progrès de la mission ; il employait ses moments libres à travailler pour ses enfants de Loango, en leur confectionnant des chapelets solides, qu'il avait soin d'envoyer à l'occasion d'une fête importante.

Rentré en France, selon les prescriptions des médecins, au printemps de l'année 1903, le P. Carrié passa quelque temps a Misserghin, puis dans son pays natal. La santé du cher père ne se remettant pas, on essaya le séjour de Pierroton, puis celui de Langonnet. Là, sans doute, il comprit que Dieu lui demandait le grand sacrifice. Exprimant le désir d'assister a la retraite annuelle des pères, à Chevilly, et d'y émettre ses vœux perpétuels, il écrivait au T. R. Père : « Ma santé ne s'améliore pas. C'est pour moi l'occasion d'une souffrance continuelle, que j'offre a Dieu pour nos Noirs. » Il vint avec bonheur a cette retraite et prononça ses vœux perpétuels le 28 août 1904 ; puis il repartit pour Notre-Dame de Langonnet. L'année suivante, il fut envoyé de nouveau à Misserghin, où il arriva le 10 novembre.

Vers la fin de janvier 1907 il donna des indices de mort prochaine. Ces symptômes ne l'effrayèrent point ; il était prêt : depuis longtemps il avait fait à Dieu le sacrifice de sa vie. Le 5 février, vers 4 heures du soir, après un long sommeil, il fut pris d'un accès de gaieté extraordinaire, plaisantant son infirmier et ceux qui se trouvaient présents, leur disant qu’il ne s'était jamais senti si bien. Puis il s'assoupit de nouveau. Une demi-heure après, l'infirmier voulut le réveiller, mais ne put se faire entendre. Le cher malade expira doucement, vers 4 heures trois quarts, pendant qu'on récitait les prières des agonisants. - Léopold Pillu - B, t. 3, p. 46.

Pour cette notice, nous laissons la parole à "La Croix de l’Aveyron", dans son numéro du dimanche, 17 février 1907.
Laissac - Mort du P. Carrié.
Le P. Joseph Carrié, missionnaire de la Congrégation du Saint-Esprit, s'est pieusement endormi dans le Seigneur, mardi 5 février 1907, à Misserghin près d'Oran (Algérie), à l'âge de 32 ans ; mais la mort de son tendre père, survenue le 21 janvier, a précipité le dénouement de sa terrible maladie. "Mon père, s'écriait-il en apprenant la triste nouvelle, a reçu le bon Dieu avant de mourir ; j'irai bientôt le revoir..." En effet, quelques jours après, lui aussi, ayant reçu les derniers sacrements, rendait sa belle âme à Dieu.

Le P. Carrié était le onzième enfant d'une honorable famille de La Gaillolière, près Laissac. Comme le onzième fils de Jacob, il reçut le nom de Joseph, nom de pureté et de tendre piété, auquel il a toujours fait honneur. A 14 ans, le désir d'être apôtre le fit entrer à Cellule (Puy-de-Dôme) pour y commencer ses études. Il les poursuivit à Merville et enfin à Chevilly, où il reçut la prêtrise le 28 octobre 1900. A cause de sa robuste constitution (il avait fait son service militaire à Clermont-Ferrand), ses supérieurs lui assignèrent les pénibles missions du Congo, administrées par Mgr Carrie. Après une courte visite à ses parents, il s'embarqua pour le Loango, situé à 5 degrés au-dessous de l'équateur.

Dans cette importante mission, le P. Carrié se dépensa pour la conversion de ses chers nègres avec une ardeur et un entrain tout apostoliques. Les conversions venaient de plus en plus nombreuses. Malheureusement les durs labeurs de l'apostolat, joints aux chaleurs écrasantes des tropiques, délabrèrent tellement sa santé, que Mgr Carrie crut prudent de l'envoyer se reposer à Mayoumba, comme directeur de séminaire. C'était encore trop de besogne pour ses forces épuisées.

Il s'embarqua donc pour la France ; mais les soins empressés qu'il reçut d'abord chez ses parents, puis à Notre-Dame de Langonnet (Bretagne), et enfin à Misserghin ne purent que prolonger de quelques années une existence si précieuse. Nos meilleures condoléances à sa famille.

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