Le Père Joseph, Marie, Le BADEZET

Né : 27/02/1915 à Guern (56)
Profès : 08/09/36 à Orly
Prêtre: 16/07/44 à Cellule
Décédé: 10/02/2014 à Chevilly (94)

AFFECTATIONS :
CONGO:
Brazzaville(46-52; vicaire N.D. de Bacongo); Brazzaville: (52-57; Direction de l'enseignement); Kibouende (58-59; vicaire); Mbamou (59-60; Directeur Petit Séminaire); Kibouende (60-74; ministère); Vinza (75-82; ministère); Kindamba (82-90; ministère);: Kibouende (90-98; ministère); Brazzaville - (99-2010; St Kizito ; ministère); FRANCE:Chevilly (2010-2014; retraite).

Avant d'arriver au Congo en 46, Badet avait déjà vécu des aventures. Durant la débâcle, il se retrouve dépassé par l'armée allemande, seul et isolé. Il marche vers le sud avec la prudence des Sioux, ne marchant que la nuit. Et alors qu'il s'estimait en sécurité, il est fait prisonnier et envoyé dans les camps en Allemagne. Il en profite pour apprendre l'allemand. Puis un jour il s'évade et finit par arriver à Cellule. Bref, Cellule, Chevilly et en 46, départ pour le Congo, à Brazzaville.
Brazza, n'était qu'une petite ville avec des villages autour. C'est dans un ces villages, Bacongo, que Joseph fait ses premières armes : 6 ans comme vicaire, puis 5 comme directeur de l'enseignement.
En 57, il est nommé pour Kibuende où il sera vicaire pendant 1 an. Petit intermède de quelques mois où il doit remplacer le directeur du petit séminaire de Mbamou. Il y accueille René Charrier qui arrive comme professeur. Il s'échappe de ce cadre dès le retour du titulaire et repart à Kibuende où il retrouve le Père Gur, son grand maître. Et c'est là que très vite, il se met à sillonner les villages à pieds, avec son sac à dos. Il disait: "La voiture a tué le ministère"
. En 75, il quitte Kibuende pour Vinza, aux confins du diocèse. C'est presque une fondation, une zone peu touchée par l'Evangile, surtout l'ethnie des Bateke. Il sillonne tous les villages, toujours à pieds. Des amis de France lui envoient des médicaments qu'il distribue s'il y a une ordonnance. Il souffre souvent de mauvaises plaies aux pieds qui ne veulent pas guérir. Il décide: "Je suis fatigué d'attendre la guérison de ces plaies. Tant pis, je repars en tournée.". 3 semaines plus tard, il revient avec des pieds tout neufs, complètement guéris.
Puis, en 82, il me rejoint à Kindamba. Ce fut le début d'une vie commune qui durera 16 ans. Jusque-là, je faisais mes tournées en Toyota. Lui n'en voulait pas. Mais les pistes correctes existant de moins en moins, j'ai suivi son exemple de tournées à pieds, pendant 3 semaines pour la plus longue. Joseph avait déjà 70 ans bien accomplis.
En 90, nous arrivons à Kibuende. Même scénario. Mais à 80 ans, il faut diminuer le kilométrage. Pour une de ses dernières sorties il faut aller à 8 km, à Manieto: "Tu veux aller à Manieto? Je t'y emmène en Toyota." - "Pas question. Je veux savoir si je peux encore." Et il revient quelques jours plus tard, fatigué mais fier "Je peux encore !"
En 98, la guerre civile s'installe pendant qu'il est en congé en France. Je dois fuir à Brazzaville. Badet m'y rejoint, à la paroisse St Kizito, pendant un an, avant que je ne sois appelé au centre-ville pour une autre tâche. Nous continuerons à nous voir au moins une fois par semaine.
À St Kisito, il se retrouve avec des écoliers par centaines. Il sera pour eux "âka Badé - Grand Père Badet". Il se charge lui-même d'une équipe qu'il suit pas à pas. Même après 80 ans, il invente, essaie de faire un nouveau catéchisme à base de dessins qu'il réalise lui-même. Ceux qui s'arrêtaient pour le regarder faire son catéchisme avec les enfants en restaient bouche bée.
Mais sa santé, ses yeux, et la vieillesse le font revenir à Chevilly pendant l'été 2010 et là encore, il continua de travailler sur son catéchisme à base de dessins.
Ce qui nous le rendait très attachant: son humour : il racontait les histoires de ses débuts à Bacongo en se moquant de lui-même : "Qu'est-ce que j'étais bête!" ; la recherche du mieux possible ; le bon vivant qui tenait à l'apéro convivial du dimanche ; sa joie: une de ses dernières paroles pendant son dernier séjour à l'hôpital: "Je suis un homme heureux!" ; sa prière discrète, le matin, après son lever à 4h30 ; son indignation devant les péchés collectifs: la corruption, la paresse, la résignation ; un homme relié à des tas d'amis par son courrier et son style bien particulier : plusieurs ont fait sa connaissance uniquement par ses lettres ils sont restés des amis.
Puisse-t-il désormais, dans la joie, contempler le Seigneur et goûter le vin du Royaume!
Joseph MERMIER
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