Le Père J.M. LEJEUNE,
1828-1888


Le P. Lejeune naquit le 6 avril 1828, à Châteauneuf-du-Faou de Jean Lejeune et de Jeanne-Françoise Brertel, d'origine lorraine mais née à Brest. Tous deux étaient des modèles de piété ; son père surtout était un rude chrétien : maréchal-ferrant et faisant en même temps office de facteur rural, il ne manquait pas un seul jour de faire le chemin de la croix, même après des courses de 10 à 12 lieues. Ils élevèrent leurs deux enfants, Marie-Françoise et Jean-Marie, dans la crainte du Seigneur et la pratique de toutes les vertus chrétiennes.

De bonne heure, le petit Jean-Marie fut envoyé à l'école chez l'instituteur de Châteauneuf. Son intelligence vive et son excellente mémoire lui firent faire de rapides progrès, et l'abbé Kermel, curé de Châteauneuf, voulut bien se charger de lui donner les premiers éléments du lx, latin. Entre en sixième au pet\'cet séminaire de Pont-Croi un travail assidu, au service d'une esprit pénétrant et d'une mémoire qui tenait du prodige, le mit à la tête de sa classe. Sa conduite, qui ne se démentit jamais, lui attirait les éloges de tous, plus encore que ses talents.

Au sortir du séminaire, en 1851, avant même d'avoir reçu la prêtrise (qu'il reçut le 25 juillet 1852), il fut envoyé par Monseigneur Graveran, en qualité d'aumônier comptable, à la Ferme école de Trévarez fondée par MM. de Ke~égu. Là, par son intelligence et son dévouement, il se montra digne du choix de son évêque, et de la noble famille dont il fut l'auxiliaire pendant sept ans. Mais il sentit bientôt que ce n'était point là sa place définitive. Impressionné par les conférences spirituelles, faites de son temps par notre Vénérable Père au grand séminaire de Quimper, il conçut le désir d'entrer dans sa congrégation. Il se rendit effectivement au noviciat de Monsivry, où il arriva le 3 octobre 1857.

Après sa profession, le 28 août 1859, il fut envoyé comme économe à N.D. de Langonnet. Mais au bout de deux ans, en raison des brillantes études qu'il avait faites à Pont-Croix et de ses talents pour la parole, on le chargea de la classe de rhétorique dans la même communauté. Il la fit avec succès jusqu'en 1875, où, par suite du départ du P. Guyot, directeur de la colonie de Saint-Michel, il fut appelé à le remplacer dans cette charge, qu'il remplit jusqu'au mois d'août 1879.

En 1879, il fut désigné, avec le P. Le Bozec et le P. Jouan, pour inaugurer la petite communauté de Gourin. Les deux œuvres principales auxquelles était destinée cette maison, étaient l'aumônerie de l'établissement des Sœurs de Saint-Joseph, et surtout la prédication dans la Basse-Bretagne.

Le P. Lejeune était là sur son terrain. Maniant la langue bretonne comme la langue française, avec aisance et facilité, zélé et infatigable, il se lança dans sa nouvelle carrière sans jamais regarder derrière lui, et remportant toujours sur le démon des victoires signalées, partout où il portait ses pas. Un peu réservé d'abord, au fur et à mesure qu'il connaît son public et gagne se confiance, il attaque les abus, les vices, les désordres, avec la franchise et la vigueur de l'apôtre, mais toujours avec prudence et sans blesser les personnes. Aussi était-il désiré par beaucoup de curés et fidèles, son passage au milieu d'eux étant d'ordinaire l'occasion de grâces signalées, et de la suppression des abus les plus invétérés.

Son zèle se manifestait également dans les retraites annuelles qu'il donnait, chaque année, dans différentes communautés, et en particulier chez les Sœurs de Saint-Joseph de Cluny. Le caractère de ses prédications, en ces circonstances, étaient l'onction et la piété. Pour attirer les grâces de Dieu, il avait coutume alors de se tenir dans un grand esprit de recueillement et de prière ; aussi son ministère était-il toujours particulièrement béni, et l'on n'oubliait pas ses paroles si pleines de foi et d'amour de Dieu.

Le P. Lejeune avait aussi une dévotion particulière pour Michel Le Nobletz, un des grands missionnaires bretons du dix-septième siècle. Il ne se contenta pas de l'imiter dans sa vie personnelle, il entreprit de travailler à sa cause de béatification, par la collecte d'aumônes et des démarches juridiques en France et à Rome. Quelques semaines avant sa mort, le P. Lejeune disait: "Lorsque la cause de dom Michel sera introduite, j'aurai terminé ma tâche ; je n'aurai plus qu'à chanter mon Nunc dimittis."

C'est le 21 avril 1888 qu'il est mort subitement à Plounévez Lochrist, où il venait de prêcher une retraite de première communion pour les enfants. Son décès a excité d'unanimes regrets dans les diocèses de Vannes et de Quimper, où il était bien connu. Son corps rapatrié à Langonnet a été inhumé dans le cimetière de la communauté ; il avait 60 ans.

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