P Emmanuel MARTIN
de la Province de France 1849 - 1914
Notes Biographiques 1679 - 1914 p. 367
Décédé 21 août 1914 à Misserghin


né à Murbach, (Haut-Rhin), diocèse de Strasbourg (68), le 20/03/1849 ; premiers vœux à Paris, le 23/08/1874 ; vœux perpétuels à Chevilly, le 20/05/1877 ; diacre à Paris, le 10/08/1873 ; prêtre à Paris, le 20/09/1873 ; décédé à Misserghin (Algérie), le 21/08/1914, à l’âge de 65 ans, après 40 ans de profession . Il a travaillé à Maurice du 12/11/1895 jusqu’au 14/04/1898 .

C’est à la demande de M. L’abbé Melleker, curé de sa paroisse et prêtre dévoué à nos œuvres de mission, que le jeune Martin Emmanuel, dût d’être admis dans la Congrégation . « Depuis deux ans, écrivait-il, je prépare ce jeune homme à suivre sa vocation . Il est âgé de 16 ans ; a beaucoup de moyens ; est très laborieux, et sa docilité égale celle d’un ange . » (Lettre du 26 août 1865)

Le sujet désigné sous des traits aussi flatteur était né à Murbach, dans le doicèse de Strasbourg, le 20 Mars 1849 .

Avant les premières leçons de latin données par ce prêtre, il avait eu celles de l’instituteur communal, puis il s’était mis externe chez les frères Maristes de Guebwiller pour recevoir d’eux l’enseignement du français . A 13 ans seulement il faisait sa première communion et ne recevait la confirmation que deux années après .

C’est en septembre 1865, que le jeune Emmanuel Martin entra au petit scolasticat, où il prit l’habit religieux huit mois plus tard, son postulat terminé . Le 10 novembre 1869, il passait au grand scolasticat et se rendait de Langonnet à Chevilly .

Il donna pendant toute la durée de son temps de formation l’impression d’un sujet sérieux, de grande piété, et d’une application soutenue à ses devoirs . N’y avait-il pas dans l’ensemble de sa tenue quelque chose d’une gravité un peu austère parfois ? Son sérieux ne dégénérait-il pas en contention d’où, moralement, une certaine mélancolie emprunte de froideur, et, physiquement, des fatigues cérébrales suivies de maux de tête ? Il y eut là un écueil qui lui fut signalé à différentes reprises, et qu’il ne réussit pas toujours à éviter . « Quant au côté moral et religieux, lit-on dans une des informations à son sujet, c’est un excellent scolastique, le meilleur qui nous soit venu de Langonnet . » (3 mai 1870)

Il avait dès le début désiré et obtenu la faveur d’émettre les vœux privés de religion . Il y ajouté plus tard le vœu de stabilité . Avait-il donc quelques appréhensions par rapport à sa fidélité ? « Jamais, écrivait-il au Très Révérend Père, il ne s’est élevé de doute dans mon esprit au sujet de mon appel à la vie religieuse dans la Congrégation ; et si j’interroge mes dispositions actuelles, je puis dire que rien au monde ne sera capable de me faire changer de sentiments . »

Il était donc tout acquis aux œuvres qui pouvaient lui échoir une fois devenu profès . Mais quel était son attrait ? Ayant à s’en ouvrir dans sa lettre de demande de profession, il s’y portait à ce touchant et si édifiant aveu : « Quant à mes goûts et attraits, mon Très Révérend Père, permettez-moi de vous exprimer ici, mon grand embarras . Je suis assez connu du R. Père maître des novices pour qu’il puisse prononcer, mais que je ne saurais le faire moi-même, sur mes goûts et attraits, qualités et défauts . Pour moi je n’aurai d’attrait pour tel ou tel genre de fonctions que lorsque je connaîtrai votre volonté me les attribuant, laquelle sera à mes yeux l’expression certaine de la volonté divine . » (lettre du 15 juillet 1874)

Après sa profession, le P. Martin fut envoyé au Sénégal . Il débarquait à Dakar le 15 novembre 1874 . Là il rencontrait son Vicaire apostolique, Mgr Duret, qui le plaça à Saint-Louis . Il se sent tout de suite pris d’un beau zèle pour apprendre la langue, prêcher et convertir . Il se ramène toutefois à ses fonctions ordinaires plus immédiates : une petite classe chez les Frères et des sermons de temps en temps à la cathédrale . Déjà il fait l’expérience que sa principale épreuve lui viendra du climat . Ce qu’il constatera de plus en plus, ses fréquentes indispositions ne lui laissant guère l’espoir d’un acclimatement et de l’exercice des ministères extérieurs rendus possible par une robuste santé . (Lettre du 12 décembre 1874 et 22 juin 1876)

Il rentre ne France et 1877, et il a le bonheur d’émettre ses vœux perpétuels . Il reçoit ensuite son obédience pour Haïti où il est placé au collège Saint-Martial . Il y professe en troisième puis n seconde, un cours d’histoire naturelle, et plus tard les mathématiques . Le dimanche, il est chargé d’un des catéchismes de persévérance . Ses pénitents - enfants ayant fait leur première communion, - sont nombreux : de 85 à 90 . (Lettre avril 1878)

Il fait aussi du ministère, prêtant assistance aux Pères de la station, les jours de grande fête, à Piétonville . Une année, à l’époque de Noël, il catéchise, et il confesse dans la paroisse de Gauthier . Il est profondément touché des bonnes dispositions des pauvres noirs . Ce qui le ravit c’est l’hommage rendu par les curés qui les invitent, au zèle intelligent des Pères du collège . Ceux-ci font dans leurs paroisses un bien que tous s’accordent à reconnaître et à provoquer le plus souvent possible . Le souvenir du P. laval lui revient et il croit le voir revivre au milieu des noirs des Antilles, modèle accompli d’abnégation et de zèle, sur lequel il veut prendre exemple . (Lettre du 2 février 1880)

Régulièrement, chaque année il écrit au Très Révérend Père sa lettre de direction . Ses résolutions du noviciat lui sont présentes et c’est la norme dont il se sert pour apprécier ses dispositions et juger de son état . En février 1879, sa lettre respire un sentiment de satisfaction plus vive . Il en donne le motif . « C’est le bonheur que j’ai éprouvé quand nous avons reçu le volume des Constitutions ; Je les ai lues et relues avec d’autant plus d’empressement que depuis longtemps déjà je soupirais après elles, comme tous les confrères . En elles, je vois l’expression exacte, pleine, entière de la très sainte et très bénigne volonté de Dieu . Aussi j’ai promis à Notre-Seigneur d’en pénétrer de plus en plus l’esprit et la lettre afin d’y être exactement fidèle, jusqu’à mon dernier soupir . » (Lettre du 2 février 1879)

Le P. Martin passa environ 8 années à Haïti . Rentré en France, il est envoyé en 1888 à la Martinique, où il trouve comme fonction celle de surveillant de récréation et de professeur de physique. Il quitte la colonie en 1891, et, revenu à Paris, il reçoit son obédience qui l’attache pour quelques temps au collège de Castelnaudary .

En octobre 1895, il s’embarque à Marseille à destination de Maurice . Le voilà de nouveau avec ses bons noirs, et sous l’influence plus immédiate des saints exemples du P. Laval qu’il vénérait. Mais décidément sa santé ne résiste pas longtemps à l’action des pays chauds . Des fièvres l’obligent à regagner la mère patrie . Il se trouvera désormais dans un milieu et avec les occupations qui avaient eu ses premières préférences . Du professorat et une vie d’intérieur, c’est ce qu’il rencontre à Merville en 1898, au séminaire des colonies en 1899, à Chevilly, où on lui donne à faire, comme intérimaire, le cours d’ascétisme . Enfin le voilà nommé supérieur de la maison de Marseille en 1902, puis placé à Seyssinet en 1905 .

Sa terre promise - car ses premiers souvenirs lui avaient composé comme un mirage sur lequel s’étaient portés maintes fois tous ses vœux, - sa terre promise, l’Afrique, il devait la retrouver non plus au Sénégal, sous la houlette de Mgr Barthet, ainsi qu’il en avait fait la demande dans une lettre du 20 mars 1891, mais sur le sol algérien, à Misserghin . C’est dans cette communauté qu’il passa ses dernières années environné de solitude et de paix .

Il y vécut, justifiant toujours les témoignages de ses anciens supérieurs, en « bon religieux et en excellent confrère » (P. Simonet 3 décembre 1880), l’esprit tout à ses pieuses méditations, à ce recueillement intense et profond où se complaisait son âme, tandis que son corps dépérissaait, miné par l’usure progressive de ses forces, sous ce climat qui lui avait toujours été funeste . Le 21 août 1914 il mourrait subitement de la rupture d’un anévrisme . Il avait 40 années de vie religieuse dont 37 de vœux perpétuels .

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