le Père Théophile Martin
1854-1886


L'un des généreux apôtres que le diocèse de Vannes a fourni aux missions d'Afrique, le Père Théophile Martin, a succombé le 17 décembre 1886. Né au village du Couëdic dans la paroisse de Crédin (doyenné de Rohan), le 13 mars 1854, il eut le bonheur d'appartenir à l'une de ces familles profondément chrétiennes où l'on considère toute chose au point de vue de la foi. Sa mère, femme douce et pieuse, se consacrait au soin de sa maison, s'appliquant avant tout à la bonne éducation de ses enfants. Le bon Dieu se plut à la récompenser, en choisissant parmi eux une religieuse et deux prêtres.

L'un de ceux-ci, Théophile, commença ses études au petit séminaire de Sainte-Anne d'Auray. Mais bientôt il sentit au fond de son cœur quelque chose qui l'appelait à une vocation plus précise. Il voulut être missionnaire. Après avoir réfléchi, prié, consulté, il résolut d'entrer dans la congrégation du Saint-Esprit et du Saint-Cœur de Marie, pour se vouer aux missions des Noirs.

Ordonné prêtre le 22 mai 1880, il fit sa profession religieuse le 29 août de la même année et reçut aussitôt sa destination pour la mission du Gabon. Il arriva, le 17 décembre sur cette plage lointaine et, coïncidence remarquable, ce fut, le 17 décembre encore, que, six ans plus tard, il devait la quitter pour le ciel.

Après avoir passé quelque temps dans l'établissement principal de Sainte-Marie de Libreville, il fut envoyé dans une station située au fond de l'estuaire du Gabon, au milieu de la tribu des Pahouins, à Saint-Paul de Donghila. Ce fut là qu'il ressentit les premières atteintes de la maladie qui devait le conduire au tombeau. Le 4 février 1882, il fut pris, tout à coup de crachements de sang, accompagnés de tous les symptômes d'une affection de poitrine. On attribua cette crise à la fatigue d'un voyage qu'il venait de faire sur la rivière Remboë, où, entre autres accidents il dut passer la nuit dans une embarcation, sous une pluie battante.

Obligé par le médecin de la colonie à rentrer en France, il quitta le Gabon le 13 février 1882. Le docteur lui accordait tout au plus trois mois de vie. "Trois mois, s'écria le P. Martin, trois mois, c'est trop peu ! Je voudrais encore fournir 4 années d'apostolat en Afrique : je vais les demander aux bonnes âmes du purgatoire." Il se remit un peu, en effet, et, sur ses vives instances, obtint la faveur de retourner mourir au Gabon, où il arriva le 18 janvier 1883.

Sa santé, sans être brillante, se maintenait, et il put aller, le 5 avril 1884, prendre la direction de la mission de Saint Joseph du Cap-Estérias. Il y remplit jusqu'à la fin ses fonctions avec la plus grande régularité. Enfin, à bout de forces, il rentra à Libreville, le 16 novembre 1886, pour se préparer au grand voyage de l'éternité. "J'avais demandé 4 ans d'apostolat, disait-il ; mon temps est expiré."

Sa faiblesse augmentait de jour en jour. Le 12 décembre, il reçut avec la foi la plus vive les derniers sacrements de la main de Mgr Le Berre, et lui dit paisiblement : "Maintenant je suis heureux et content, en remerciant Dieu de m'avoir fait la grâce de m'appeler à être missionnaire des Noirs du Gabon, et de me faire persévérer jusqu'à la fin. Je n'ai qu'un regret c'est de n'avoir pas mieux profité de cette insigne faveur, et de cette précieuse mais redoutable vocation."

Son agonie fut longue et pénible ; durant plus de 24 heures il demeura entre la vie et la mort, pouvant à peine respirer, mais ayant sa parfaite connaissance. Lorsqu'on lui montrait sa croix de missionnaire, il en approchait vivement ses lèvres et la suivait de son regard.

Mgr Le Berre annonçant son décès, écrivit : "Sa mort a été bien édifiante. Il a rendu sa belle âme à Dieu, après avoir émis avec bonheur ses vœux perpétuels."

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