Le P. Théophile MEYER,
de la Province de France, décédé à Emsworth, le 30 juin 1938,
à l'âge de 82 ans, après 55 ans de profession.


L'empire napoléonien reconnaissait le talent, particuliè­rement lorsqu'il s'agissait de l'enseignement du français. C'est la raison pour laquelle il remarqua un obscur maître­ d'école alsacien et le décora à trois occasions différentes. Mais de plus grands honneurs devaient lui être réservés, non de la part du Gouvernement français, mais de la part du Maître de la vie, car le 5 mars 1857, un enfant naquit à ce maître d'école distingué, un enfant qui allait être connu et vénéré sous le nord de P. Théophile Meyer.

Le P. Théophile Meyer acheva son éducation primaire à Strasbourg, et après mûre réflexion et. maintes prières, demanda son admission dans la Congrégation du Saint­Esprit et du Coeur Immaculé de Marie. Il fit ses études à Cellule, et à l'âge de 24 ans, il fut ordonné prêtre à Paris le 28 octobre 1881. Après une année de noviciat, il émit ses vœux et partit immédiatement pour l'Irlande. Il y étudia l'anglais afin de se préparer pour les missions en Amérique. Son premier poste fut l'église de Sainte-Marie, à Sharspburg, où il débuta comme vicaire. A cette époque la paroisse s'étendait si avant dans les districts ruraux des environs que le P. Meyer devint de fait un véritable missionnaire et un pionnier. Comme aumônier clé la Maison Pénitentiaire et de l'Asile des Pauvres, il parcourut à cheval toute la région jusqu'à la vallée d'Allegheny River. De 1887 à 1890 il demeura à Détroit, où deux paroisses, Saint-Joseph et Saint-Joachim, ressentirent les bienfaits de son ministère sacerdotal. Partout la réputation d'un homme au dévoue­ment sérieux, au zèle infatigable, le suivait comme un corol­laire naturel de son travail. Il se rendit compte de la néces­sité de préserver la jeunesse catholique devant la rapidité de l'extension de la ville de Détroit. Il se dévoua et se sacrifia pour cet idéal. Il rallia les jeunes gens autour de lui, forma des clubs pour leur procurer une aide matérielle et favo­riser leurs études, enfin les pourvut de moyens de préser­vation que tous apprirent à apprécier davantage à mesure que les années passèrent.

En 1891, après un repos bien gagné en Alsace, il fut envoyé à Pittsburgh. Il fut placé à l'église du Saint-Nom, Troy Hill, en qualité de vicaire du P. Moilinger, et prit la succession de celui-ci en 1892. Nous le trouvons ensuite à la Faculté du Collège du Saint-Esprit, depuis Université Duquesne. En même temps il fut nommé curé de la paroisse du Sacré-Coeur, nouvellement fondée à Emsworth, et de la paroisse de Sainte-Marie à Glenfield. Pendant trois ans, il fit la navette entre le collège et ses deux paroisses, et ce ne fut qu'en octobre 1895 qu'il établit sa résidence permanente à Ems­worth. Le Père resta curé. des deux paroisses jusqu'à sa mort. Quoique ces deux paroisses fussent petites, les fidèles étaient éparpillés sur un large territoire et la charge du pasteur était souvent bien pénible à cause des routes défon­cées et du manque de facilités de transport. Avec des pro­jets minutieusement étudiés et un effort patient, il se con­sacra au travail de construction et d'expansion.

Le premier résultat fut atteint en 1907 quand la vieille église de Glenfield tombant en ruines fut remplacée par une belle construction en pierres de taille. A la même époque des progrès sensibles furent réalisés dans la paroisse d'Ems­worth. La dette fut payée rapidement, l'église achevée, et la sacristie garnie de tous les ornements nécessaires. A mesure que la paroisse augmenta, le Père se trouva dans la néces­sité de bâtir une école paroissiale. A cet effet, un large espace de terrain fut acheté aux North and Beaver Avenues et les plans furent discutés. Ce rêve ne fut malheureusement réalisé qu'en 1924. Le ler octobre de cette année, on com­mença à creuser les fondations d'une école moderne. Le bâtiment fut achevé en 1925 et sous la direction de deux Sœurs Franciscaines de Mont-Alvernia, cent vingt enfants furent inscrits. A partir de ce moment, par tous les temps, on pouvait voir le P. Meyer faire le chemin de son école à l'heure du catéchisme. Bien plus, il ne réserve pas les bien­faits de l'éducation catholique aux seuls enfants d'Ems­worth, car en 1928 il ouvre une école de deux classes à Glen­field sous la direction de deux Sœurs Franciscaines avec soixante-cinq enfants.

Le P. Théophile Meyer jouit d'une bonne santé jusqu'au jour de sa mort. Durant le cours de sa longue vie il eut bien quelques petits accidents, comme la fracture du bras gauche en 1903, du bras droit en 1928, mais sa vitalité extraordi­naire était au-dessus de ces accidents passagers, Même le diabète à l'état chronique n'offrait d'autres difficultés que les inconvénients du régime. Son fond d'énergie natu­relle lui préparait une vie longue et heureuse et faisait de lui un confrère souriant et gai; jamais on ne l'a entendu dire un mot malveillant sur le compte d'autrui; avec cela, d'un accueil cordial envers n'importe quel hôte, et d'une prévenance paternelle et amicale envers ses désirs.

Le 29 juin, le P. Meyer et le P. Szumierski décidèrent de faire une visite au P. Mehler à Tarentum. En chemin leur chauffeur perdit le contrôle du volant, et la voiture alla s'écraser contre un poteau au bord de la route. Tous les deux furent projetés dehors, mais tandis que le P. Szu­mierski n'eut que des contusions légères, les blessures du P. Meyer furent plus graves. Sur sa demande, on l'emmena à l'hôpital de Saint-François, et là, après avoir reçu les derniers sacrements, il alla recevoir la récompense éternelle le 30 juin à 7 h. 45 du matin. Une messe solennelle de Requiem fut célébrée à *Einsworth, puis son corps fut porté à son cher Glenfield. Le lendemain, après une grand'messe solennelle, ses restes furent, confiés au cimetière de Sainte-Marie où il avait demandé à être enterréavec ceux pour qui il avait si durement travaillé et pour qui il avait fait tant de sacrifices.

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