Roger a eu
une jeunesse riche en péripéties, tant durant sa formation commencée avant la
guerre dans son diocèse, que chez les spiritains pendant la guerre, à St Michel
en Priziac, Langonnet, Piré, Cellule et Mortain, avant de rejoindre Chevilly
pour y étudier la théologie. C'est dans la grande chapelle de cette maison
qu'il sera ordonné prêtre en février 1950.
Six mois plus tard, Roger
s'embarque pour le Cameroun et cinquante années de vie missionnaire et
apostolique, riches à tout point de vue. Il se qualifiait lui-même de
missionnaire bouche-trou, car à plusieurs reprises, il a accepté de faire des
remplacements, ou d'aller tenir compagnie à un confrère. Et toujours dans la
bonne humeur. L'exception a cependant confirmé la règle puisqu'il a passé 33
ans à Akonolinga, à l'est de Yaoundé. C'est là qu'il a pu donner le meilleur de
lui-même. Il maitrisait parfaitement l'Ewondo. Il était un homme de foi et un
priant. Il aimait les tournées dans les villages. Il avait ce don de prendre
les gens là où ils se trouvaient pour les aider à progresser. Il savait parler
à temps et à contre temps d'une voix toujours égale, celle d'un homme que la
présence de Dieu habitait et avait pacifié, celle d'un homme humble et sans
prétention. Il fut un homme d'écoute: il écoutait les gens qui venaient lui
confier leurs joies, leurs peines, leurs difficultés. Il a soutenu et aidé
beaucoup de jeunes à qui il a permis de faire de bonnes études, des moins
jeunes, des veuves, des malades, et en dernier lieu des réfugiés venus du
lointain Rwanda.
Partout, le même souci : celui de la catéchèse des
enfants en âge scolaire. Il voulait que tous les enfants puissent être
catéchisés, ceux des écoles publiques aussi bien que ceux des écoles
catholiques. Il a aimé les repas de fête organisés par les familles au moment
des baptêmes, des confirmations ou des mariages. Il aimait aller rencontrer les
gens chez eux. Il organisait la visite systématique de tous les chrétiens du
secteur. Il écrit :
« Le grand travail est de visiter les gens, case par
case dans leur village pour les écouter et rejoindre leur vécu quotidien ».
Il en profitait pour saluer tout le monde. Et cela fut très apprécié partout.
Enfin, un peu contre son gré, Roger passa 8 années de son séjour au
Cameroun, dans la formation, comme professeur, directeur, ou accompagnateur
spirituel dans différents séminaires. Mgr Adalbert Ndzana, évêque émérite de
Mbalmayo, lui rend hommage pour son sérieux à assurer à ses élèves des cours de
qualité et une formation humaine solide. Il le remercie au nom de tous les
anciens devenus prêtres, évêques, mais aussi ministres, médecins, professeurs,
magistrats. Et il termine :
« La formation des jeunes, voilà votre
passion ! » Roger n'a pas été épargné par la maladie. Il fut la proie
du paludisme, de la filariose, du cancer et bien d'autres parasites qui ont
nécessité plusieurs retours en France pour des soins et du repos. En 2000, il
rentre en France définitivement. C'est la fin de
« mon épopée missionnaire,
écrit-il, je rends grâce à Dieu des cinquante années de bonheur que j'ai
passées au Cameroun ». Commence alors pour lui, le temps du silence et
du dépouillement : la marche devient difficile, les doigts se paralysent; les
jambes lui font mal; ses oreilles le trahissent :
« Je vis en ermite »
répétait-il souvent ! A Chevilly, il voit ses voisins mourir les uns après les
autres.
« Et moi s'interroge-t-il, pourquoi suis-je encore l ? » Celui
en qui il a cru de tout son cœur et qu'il a aimé et servi de toutes ses forces
est venu le chercher dans son sommeil au matin de la Transfiguration. Quel plus
beau cadeau le Seigneur pouvait-il lui réserver?
Gabriel MYOTTE DUQUET
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