Le Père Jean-Baptiste PASCAL,
1814-1865


Né le 6 avril 1814 à Toulouse, le petit Jean-Baptiste ne fut baptisé que sept jours plus tard "à cause des troubles occasionnés dans la ville par l'abdication de l'Empereur Napoléon."

A l'âge de douze ans, il eut le bonheur de faire sa première communion, et trois mois après il entra au petit séminaire diocésain. Les années de sa jeunesse passées dans ce milieu furent pour lui le plus doux de ses souvenirs. Sa tendre piété envers Marie, qu'il appela dès lors du nom de Bonne Mère, et son amour pour Jésus, dont il s'efforça de procurer toujours la plus grande gloire, le firent bientôt distin guer par ses directeurs. Les années de grand séminaire se passèrent dans la même ferveur, jusqu'à son ordination sacerdotale le 17 décembre 1840.

Ordonné prêtre, il fut nommé vicaire à Nailloux. Auxiliaire laborieux d'un pasteur infirme, il administra cette paroisse avec une prudence digne d'un âge plus avancé. Il fut bientôt appelé à la cure de Montlaur, dans le doyenné de Montgiscard.

Mais les labeurs de ministère ordinaire ne suffisaient pas à cette âme d'apôtre. Il demanda à M. Le Guay, alors supérieur du Séminaire du Saint-Esprit à Paris, la faveur d'aller dans les colonies pour s'y dévouer àl'évangélisation des pauvres Noirs qui, alors, étaient encore esclaves.

Après quelques mois passés dans cette maison, il s'embarqua a Nantes, vers la fin de 1846. A son arrivée à l'île de la Réunion, il obtint de Mgr Poncelet d'être attaché spécialement à l'œuvre des Noirs, et d'y continuer les travaux qu'y avaient si bien commencés l'abbé Monnet et les Pères du Saint-Cœur de Marie. Ses succès parmi les Noirs, et aussi dans la population blanche, lui eurent bientôt conquis l'estime de toute la ville de Saint-Denis. Il fut ensuite vicaire de Saint-Benoît et curé de Saint-Leu. Il y travailla avec tant dé zèle que bientôt la population fut toute transformée. Le résultat fut le même à la cure de la cathédrale, puis à celle de Saint-Paul. C'était le fruit de sa très grande piété, de la beauté de ses offices religieux, de sa charité universelle de tous les instants, et de son humilité qui le poussait à toujours pardonner même àses calomniateurs.

Revenu en France pour un congé en 1857, l'abbé Pascal se remit immédiatement en mer pour satisfaire sa piété en visitant les plus célèbres sanctuaires de l'Italie et de la Palestine. Au retour de son pèlerinage àJérusalem, il rendit visite à sa famille et embrassa ses vieux parents presque octogénaires. Il voulut encore se rendre dans les Alpes à la montagne de la Salette. C'est là qu'il demanda à la congrégation du Saint-Esprit d'accepter sa candidature au noviciat. Le 26 août 1860, en la fête du Très Saint Cœur de Marie, il faisait sa profession religieuse et émettait ses premiers vœux.

Le 13 novembre suivant, le Père Pascal faisait ses adieux à la maison mère de sa congrégation, à Paris, et recevait sa destination pour la nouvelle mission d'Haïti, qui, après de longues années de schisme, venait enfin de se rouvrir aux ouvriers apostoliques. Le Père Pascal fut heureux de s'y dévouer. Tout le reste de sa vie devait être désormais pour ses chers Noirs d'Haïti.

Après la chute de l'empereur Soulouque, le président de la nouvelle République haïtienne, comprenant l'importance de la vraie religion pour le bien de son pays, avait renoué des relations avec le Saint-Siège. Un Concordat venait d'être conclu. Le zèle intelligent et expérimenté du Père Pascal aplanit au Délégué apostolique bien des obstacles. Le retour en Europe du Délégué apostolique laissa le Père Pascal seul à la tête de cette Église naissante, avec le titre de Vicaire général administrateur. Son humilité eut grand mal à accepter, mais son obéissance fit de lui le bon pasteur toujours disposé à donner sa vie pour ses brebis.

Son influence se manifesta de façon particulière lors d'une dangereuse tension entre le gouvernement haïtien et la couronne d'Espagne, à propos de la délimitation de la frontière avec la republique dominicaine placée sous le protectorat espagnol. Huit bâtiments de guerre de la marine espagnole s'apprêtaient à bombarder la ville de Port-auPrince. Les officiers haïtiens poussaient le Président à la résistance. le Père Pascal essaya, en vain, de calmer la population à l'église comme sur les places publiques. Il décida alors de se rendre au palais du Gouvernement pour exprimer au Chef de l'Etat sa profonde douleur, le conjurant, par ses larmes et par la vue des dangers pour le peuple, de ne point écouter de funestes conseils. A sa vue, l'exaltation parut enfin s'apaiser peu a peu, pour faire place à la prudence. On consentit à entendre les propositions de paix, et, grâce à l'ascendant de la religion, la ville de Port-au-Prince fut sauvée du bombardement et de la ruine.

- En février 1862, le nouveau Délégué apostolique, Mgr du Cosquer, maintint le Père Pascal dans son titre de Vicaire général. Tout en faisant le bien sous toutes ses formes, il fallut lutter contre les ennemis du concordat. Il y mit toute son énergie, et l'opposition battit en retraite ; mais la victoire définitive n'est jamais assurée.

Au printemps 1864, le Père Pascal tomba très gravement malade par suite de l'excès de ses fatigues. Pour le mettre en semi-retraite, il, fut appelé, avec un de ses confrères le P. Chenay, à fonder une mission nouvelle dans la partie la plus abandonnée au point de vue religieux, la mission de Saletrou. Le P. Chenay entreprit l'exploration des Mornes, pour se rendre compte du nouveau théâtre où il devait exercer son zèle. Mais à peine avait-il commencé qu'il fut atteint d'une très forte fièvre ; transporté à la ville voisine de Jacmel, il rendit son âme à Dieu, le 15 août, fête de l'Assomption de la Rtès Sainte Vierge.

Dès le lendemain, le Père Pascal, sans connaître aucunement la mort de son confrère, expirait lui aussi à Saletrou, où il fut inhumé.

Par sa vie et sa mort, le Père Pascal nous redit à sa manière les paroles de St Paul aux Romains : "Nul d'entre nous ne vit pour soi-meme, comme nul ne meurt pour soi-même ; si nous vivons, nous vivons pour le Seigneur, et si nous mourons, nous mourons pour le Seigneur. Dans la vie comme dans la mort nous appartenons au Seigneur. Car le Christ est mort et revenu à la vie pour être le Seigneur des morts et des vivants."

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