Le Père Julien PÉGHAIRE,
1898-1952.


Né à Aiguilhe près du Puy, le 4 août 1898, il fit ses études primaires à Langogne, puis ses études secondaires à Gentinnes (Belgique) de 1911 à1917. Il méritait régulièrement les meilleures notes en conduite, en études et en examens. Après le baccalauréat, il fit sa demande d'entrée au noviciat qui était alors à Louvain. Le maître des novices notait au premier semestre : "Il se croit appelé à entrer dans une congrégation enseignante, dominicains ou jésuites, et cela à cause de ses facilités intellectuelles, qu'il s'exagère beaucoup." Au second semestre, il notait : "Sa vocation se raffermit, mais sans doute ses hésitations reviendront." Cependant, dans sa demande d'admission à la profession, le novice affirmait son attachement à la congrégation et son attrait de plus en plus fort pour les missions d'Afrique. Ce désir d'apostolat africain ne le quittera pas ; il l'exprimera de nouveau en 1925 et en 1932. Mais l'obéissance religieuse le maintiendra dans les études et dans l'enseignement secondaire et universitaire, en France de 1925 à1930, puis au Canada au collège de Saint-Alexandre et à l'Université d'Ottawa.

Un article d'un journal du Québec nous mettra dans l'ambiance de la vie du Père Péghaire, en 1932 : "Ouverture de la saison de la Société Thomiste : sous la présidence de Son Excellence Mgr l'Archevêque : magnifique conférence par le R.P. Péghaire sur l'axiome "Bonum est diffusivum sui".

"Le Révérend Père Péghaire est fils de la France, et même de l'Auvergne. C'est dire qu'avec lui les difficultés de la philosophie cèdent plutôt qu'elles ne résistent. Il appartient à la Congrégation des Pères du Saint-Esprit. A Rome, où il a suivi le cycle des sciences ecclésiastiques, il a conquis les grades de docteur en philosophie et en théologie, et de bachelier en droit canonique. Plusieurs années durant, il a professé la philosophie au scolasticat de sa famille religieuse, en Normandie. Voici maintenant qu'il s'efforce de dévoiler les arcanes de la sagesse aux petits canadiens du collège apostolique SaintAlexandre. Il est également chargé d'un cours de critériologie à la Faculté de philosophie de l'Université de Montréal

"La conférence - Le sujet développé n'est pas de ceux qui se résument aisément dans une colonne de journal. "D'où provient l'axiome "Bonum est diffusivum sui" et quel sens les docteurs lui ont-ils donné le long des âges ? " "Platon, Plotin, Proclus, Denys l'Aréopagite, Saint Thomas, tour à tour consultés, répondent à ces questions.

"Les néo-platoniciens prêtaient à l'axiome un double sens : celui de causalité efficiente et de causalité finale. Saint Thomas le restreint à la causalité finale. Par là il a redressé Platon et son École, leur enlevant le principe de leur déterminisme et de leur panthéisme. Il a même surpassé Aristote de qui le Dieu, enfoncé dans une contemplation solitaire, ne prenait aucun soin des affaires du monde.

'Une telle conférence, critique, savante, et où les auteurs énumérés sont étudiés avec soin, précision et clarté honore le conférencier et sa famille religieuse.

La "Revue de l'Université" publiera le texte in extenso.(l)

Vingt ans plus tard, une hémorragie cérébrale a brusquement transféré le Père Péghaire de la terre au ciel , le 3 mars 1952. Il n'avait que 54 ans !

(1) Pour nous qui n'avons pas lu la conférence du Père Péghaire, essayons de préciser les deux interprétations de l'axiome "Bonum est diffusivum sui" :
La première interprétation, incluant cause efficiente et cause finale, donnerait la traduction suivante : Le Bien est tel, qu’ïl se répand nécessairement... Pour ceux-là, Dieu aurait créé nécessairement.
Pour St Thomas au contraire, la traduction serait la suivante : Le Bien est tel, qu'il tend à se répandre. Pour lui, Dieu a créé librement, par un acte de charité parfaite.

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