Le Frère Timoléon (Joseph) PETIZON
décédé le 8 mars 1999 à Wolxheim, âgé de 87 ans


Né : le 24 mars 1911 à Lepuix-Gy (90). Profès : le 9 septembre 1935, à Chevilly
AFFECTATIONS:
FRANCE: Chevilly, buandier (35-38) ; Mortain, forgeron, électricien, plombier (38-46) Cameroun: (les métiers divers de la construction, de la mécanique ou de l'entretien) Douala (46-49) ; Makak (49-61) ; Bonepoupa (61-67) ; Douala (67-68) ; Ekité (68-70) Mission St-André et Hôpital, entretien, transports dans la région (70-88) FRANCE: Blotzheim (78-79). DOUALA (Procure) (79-88). RETRAITE: Wolxheim (88-99)

Quand je pense à toi, cher Timo, j'évoque deux choses : ton camion et ton rire, aussi bruyants l'un que l'autre. De loin le camion disait ton approche : « Voilà Timo qui arrive ! » Quand on entendait un grand rire éclater, on savait : « Timo est à la maison ! »

Tu savais rire, tu savais aussi travailler, énormément, sans rien craindre. Tu n'avais pas craint pendant la guerre de t'évader. Au Cameroun, tu n'as pas craint d'aller, avec un autre confrère, rechercher le corps du P. Courtecuisse, que les maquisards venait de tuer. Quand les policiers t'arrêtaient sur les routes, il te manquait toujours un papier, mais tu n'avais pas peur : tu trouvais les mots pour faire rire et obtenir de passer.

Tu ne craignais pas non plus pour ta santé : à force de chercher de l'eau, un puits, pour alimenter le petit séminaire, n'es-tu pas tombé totalement épuisé ? Tu ne craignais pas de passer toute la nuit dans ton camion. Même, une fois, je t'ai fait des reproches : n'avais-tu pas dormi dans ton camion à quelques centaines de mètres de la mission, te refusant à me réveiller ? Tu ne voulais ni gêner ni déranger personne !

Que d'heures de travail aussi pour entretenir le bélier hydraulique et fournir l'hôpital en eau courante ; que d'heures à poser l'installation électrique pour qu'on puisse opérer les malades avec pour luminaire autre chose qu'une lampe tempête Que d'expéditions qui ramèneraient dans ton camion, - fidèle compagnon, mais si usé des cartons de médicaments pour les malades, du pétrole pour s'éclairer, des planches, des tôles pour la construction de cases, au service des gens de brousse qui n'avaient rien !

Après 40 ans de travail, sans repos, on t'a rappelé en France pour te reposer. Ça, tu ne connaissais pas, mais je pense que tu l'as pris aussi avec beaucoup de courage.

Tu aimais rire et raconter des histoires, des histoires vraies, de ta vie de tous les jours : tes ennuis, tu les tournais en histoires pour rire. Nous étions quelques confrères, « voisins », mais séparés les uns des autres, par 100 à 200 km. On ne vivait pas en communauté : trop loin. On reconstituait à l'occasion la communauté, en se retrouvant pour quelques jours. On jouait aux cartes, et si les derniers temps ta vue baissait, tu voyais encore assez bien pour voir nos petites ... erreurs, avouons : nos petites tricheries. On se délassait, on priait aussi, un peu. Surtout on se racontait nos petites histoires de chaque jour, histoires drôles, parfois pas si drôles... Mais on riait bien et beaucoup : quelle joie de se retrouver ainsi !

Cher Timo, te voilà parti pour ton dernier voyage. Je pense qu'à ton arrivée au ciel, on entendra des voix, tes amis du Cameroun: « Voilà Timo qui arrive » et tu répondras par ton grand rire, joyeux, éclatant.
Martin LE LAN

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