Monseigneur Paul PICHOT,
1874-1954


Paul Pichot naquit dans le diocèse de Coutances aux Cresnays de Brécey, le 11 juillet 1874. Encore jeune, il perdit ses parents ; il ne lui resta que des tantes, dont l'une était religieuse du Tiers-Ordre de NotreDame du Mont-Carmel, et un frère auquel il s'attacha beaucoup et dont il chercha à s'occuper. Il fit ses études classiques au petit séminaire de Mortain. L'Abbaye n'était pas encore aux spiritains, mais ils y étaient connus, surtout grâce à un ancien élève, le célèbre Mgr Le Roy. Bachelier, il se présenta comme postulant à l'abbaye de Langonnet pour le cours de philosophie. Le supérieur nota à son sujet : "Sujet bien doué du côté des talents, pourtant moins d'aptitudes pour la philosophie que pour les lettres. Au début de l'année il eut à prendre des ménagements pour sa santé, mais sa santé s'est fortifiée."

Désireux de se consacrer aux missions d'Afrique, il fut admis à l'oblation en juin 1894. A peine entré à Chevilly, il eut à.subir une sérieuse épreuve de santé. Envoyé dans sa famille à plusieurs reprises, il restait toujours en contact avec ses supérieurs. Il commença son noviciat, mais il dut l'interrompre au bout de cinq mois, et passa une année au collège de Merville comme surveillant et accessoirement professeur de septième. Il reconnut que l'enseignement ne lui convenait pas, mais son désir des missions d'Afrique le soutenait toujours. De retour à Chevilly, il fit profession après l'année de noviciat, et fut ordonné prêtre en octobre 1899. Le 22 février 1899, consacré à l'apostolat, il avait reçu son obédience pour la grande île de Madagascar.

Il arrive en fin d'année à Diégo-Suarez (qui portait alors le nom.d'Antsiranana, qu'il a retrouvé depuis), Le vicaire apostolique, Mgr Corbet, le nomma procureur de la mission ; de ce fait, il prenait place après le Père Heitz, vicaire général. Il fut en même temps chargé d'un district voisin, celui d'Amakia, un coin désolé où la religion n'était guère pratiquée -, il s'y rendit régulièrement et montra qu'il ne fallait jamais désespérer. Au centre de Diégo, il mena à bien la construction de la maison de communauté, œuvre importante.

Il fut alors envoyé comme supérieur à Majunga, qui devenait une vraie ville. Le ministère y était organisé avec ses catéchismes, ses œuvres de charité et d'éducation de l'enfance. Le milieu paroissial comprenait quelques Européens, un certain nombre de Créoles et surtout les Malgaches. Ceux-ci étaient confinés dans le quartier de Mahabibo ; le Père Pichot leur construisit une belle église, qui resta longtemps la plus importante, avant l'érection de la cathédrale. En 1907, la peste qui sévit dans le pays éprouva Majunga. La précaution que prit l'administration de livrer au feu les maisons ou abris contaminés limita les dégâts ; les deux tiers de la ville malgache furent cependant détruits, mais ne tardèrent pas à être rebâtis après l'épidémie. Puis les Pères de Majunga s'occupèrent d'étendre leur action aux environs de la ville. Ils avaient en outre à soutenir les écoles, à assurer le service des hôpitaux et à pourvoir aux mille soins d'une paroisse peuplée et fort étendue.

Après son congé en France, le Père Pichot revint en 1909 à Diégo-Suarez comme vicaire général à la suite du P. Heitz. Il devait y rester jusqu'en 1922. En son absence, la cathédrale avait été construite, spacieuse, solide : elle subit sans céder en rien les deux cyclones de 1911 et 1912. Cette église était bien fréquentée, les associations pieuses s'y étaient multipliées ; le P. Pichot s'appliqua à entretenir ce courant et à l'amplifier. En même temps, huit humbles chapelles étaient élevées dans les quartiers excentriques. Des catéchistes zélés y enseignaient la doctrine et on y célébrait la messe une fois par mois. Somme toute, les résultats étaient consolants.

Mgr Corbet mourut après huit jours de maladie, le 28 juillet 1914. C'est Mgr Fortineau qui lui succéda sans changer quoi que ce soit à la marche du vicariat et en particulier à celle du centre de Diégo-Suarez. En 1921, le Père Pichot bien fatigué dut rentrer en France.

Reposé, il fut appelé par Mgr Le Roy à la maison mère où il rendit de grands services au supérieur général, aux Sœurs spiritaines et à divers ministères paroissiaux. C'est là qu'il reçut le bref du 20 mars 1923 le nommant vicaire apostolique de Majunga et chargé de la préfecture apostolique de Mayotte et de Nossi-Bé qui avait jusque-là dépendue du vicaire apostolique de Diégo-Suarez.. La cérémonie du sacre eut lieu à la maison mère le 30 juin : le cardinal Dubois fut le prélat consécrateur, assisté de Mgr Le Roy et de Mgr Algeyer.

Avant sa rentrée à Majunga, Mgr Pichot eut la joie de présider la cérémonie d'inauguration du scolasticat de philosophie à l'Abbaye Blanche où il avait fait ses études. Il eut à revenir en France en 1926 et en 1938 pour le chapitre général de la Congrégation. En cette dernière occasion, il lui fut donné de célébrer à Notre-Dame de Paris la messe des obsèques de Mgr Le Roy.

Les bons résultats de sa gestion comme vicaire apostolique de Majunga ressortent des chiffres des années de 1923 et 1939 : les prêtres passent de 9 à 29, les catholiques de 14 400 à 30 618 ; et les religieuses viennent s'y insérer : 17 sœurs européennes et 12 sceurs indigènes. C'est un progrès remarquable.

En 1932, la préfecture de Mayotte et de Nossi-bé fut agrandie par une partie du vicariat de Diégo-Suarez, et l'ensemble fut confié par Rome aux capucins de la province d'Alsace. Mgr Pichot y perdait trois de ses stations, avec les ressources matérielles qu'avaient assurées les plantations de Nossi-Bé. Ces ennuis furent cause qu'il songea, dès lors, à se démettre de ses fonctions. Il le fit le 10 Mai 1940. Mgr Wolff lui succéda en 1941. A cause de la guerre, il resta sur place jusqu'en 1945 et rentra en France.

Il prit sa retraite dans la communauté de Piré-sur-Sciche dans le diocèse de Rennes. En février 1948, il présida les obsèques de Mgr Fortineau qui s'était retiré à Machecoul en Vendée. En juillet de la même année, il célébra à Piré ses noces d'or de missionnaire et le 25* anniversaire de son ordination épiscopale. Il s'éteignit le 20 avril 1954, dans sa 80e année. Ses obsèques eurent lieu dans l'église paroissiale de Piré ; il repose dans le petit cimetière de la communauté. Ce fut non seulement un deuil pour la congrégation du Saint-Esprit, mais pour le diocèse qui l'avait vu naître, et pour le séminaire de Mortain, auquel il était resté, toute sa vie, si profondément attaché.

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