Le Frère Gérand ROBO,
1910-1985


Le Frère Gérand, Mathurin de son nom de baptême, naquit à Kerfourn, le 13 mai 1910, dans cette terre de Bretagne qui a donné tant de missionnaires à l'Eglise.

Il fit sa profession religieuse à Chevilly, le 9 septembre 1929. Comme beaucoup de Frères de cette époque. il n'eut pas la joie de partir en mission. A part un bref séjour en Suisse, à Fribourg et au Bouveret, de 1935 à 1939, et sa déportation par les Allemands au camp de Neuengamme, près de Hambourg, de 1944 à 1945, il mit ses compétences de tailleur, de chauffeur et d'électricien au service de nos communautés de France.

En 1941, nous le trouvons à l'Abbaye Blanche de Mortain, vidée bientôt de ses scolastiques et occupée en grande partie par l'armée allemande. L'année suivante, il est appelé comme portier à la maison mère, charge qui, peu de temps après, devait avoir pour lui de lourdes et pénibles conséquences. En effet, un Frère de la rue Lhomond était engagé dans une filière d'évasion d'aviateurs alliés, et la Gestapo, sur dénonciation sans doute, fut mise au courant. Au mois de février 1944, le Frère Rufus, le Père Emile Muller, supérieur de la maison, et le Frère Gérand, portier, furent déportés tous les trois en Allemagne. Le Père Muller devait mourir là-bas ; les deux Frères réussirent, grâce, sans doute, à leur jeune âge et à leur résistance physique, à revenir vivant, en 1945. De ce séjour derrière les barbelés et les miradors, de ces longs mois de privation, d'humiliation, de souffrance, le Frère Gérand n'aimait pas à parler ; il avait peur de réveiller ses cauchemars. A son retour de déportation, il reprit courageusement ses fonctions de portier à la rue Lhomond.

Sa santé qu'il ne retrouva jamais totalement (il était déclaré invalide à 100%), et sa difficulté toujours plus grande à se déplacer, firent qu'on l'envoya en 1952 à Allex oû, pendant 18 ans, il rendit service à la communauté comme chauffeur-commissionaire et comme chauffagiste.

En 1970, il vint à la Croix-Valmer où il devait passer une préretraite encore bien active, mettant toutes ses compétences de chauffeur, d'électricien, de plombier, au service de la communauté et des hâtes. Il passait ses temps libres à faire de la peinture ; il avait un réel talent dans cet art. C'est à La Croix-Valmer qu'il a été décoré, le 18 septembre 1977, de la Légion d'honneur et de la Croix de guerre avec palme, pour fait de résistance et déportation.

Sa santé déclinant de plus en plus, il demanda en 1983 à rejoindre l'Abbaye de Langonnet. C'est là que le Seigneur le rappela à lui, la veille du 15 août 1985.

Le Frère Gérand nous laisse le souvenir d'un religieux consciencieux, serviable, d'une piété solide, d'une dévotion mariale, affermie sans doute durant ses longs mois de déportation. Notre-Darne a dû l'accueillir avec joie, le jour de l'Assomption 1985.
P. Joseph Hirtz

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