Le Frère Grégoire SEY,
1822-1857


Voici comment, à Bordeaux, le 29 avril 1879, le Père Gravière faisait le portrait du Frère Grégoire : " Le bon F. Grégoire, l'inséparable compagnon de Mgr Bessieux, fut reçu en 1822, à la maison des enfants trouvés de Bordeaux. Il venait de naître. Ses parents lui sont restés inconnus. Il paraît que le Divin Maître se l'attacha de bonne heure. Une bonne vieille mère, sœur de St-Vincent, m'en a fait encore hier le portrait le plus satisfaisant. Dès son enfance, il fut porté à se donner au bon Dieu de tout son cœur. C'est dans une visite que notre Vénéré Père, passant à Bordeaux, fit à ces pauvres enfants, que les futurs Frères Pierre et Grégoire se décidèrent à la vocation religieuse. Cette bonne Sœur me disait que notre Père Libermann av ait fait plusieurs visites à leurs enfants, et que sa présence et ses paroles avaient toujours produit les meilleures impressions... Pendant dix mois, que je suis resté au Gabon, avec le F. Grégoire, j'ai constaté que ce bon Frère était une âme privilégiée de Dieu par sa simplicité et sa droiture surnaturelle. Il était peu intelligent, peu capable, mais toujours prêt à tout faire pour ne pas déplaire à Dieu. "

Il nous reste à montrer jusqu'où alla le F. Grégoire "pour ne pas déplaire à Dieu". Il fit partie du groupe des dix missionnaires qui partirent en 1843 pour établir des missions sur les côtes de l'Afrique de l'Ouest, au-delà du Sénégal. Ce fut une aventure héroïque et tragique : six moururent, deux purent être rapatriés en France, seuls le P. Bessieux et le F. Grégoire parvinrent au Gabon et fondèrent la première mission.

A la première escale, au Cap des Palmes, le F. Grégoire eut le privilège d'être le premier malade, le premier à recevoir l'extrêmeonction. C'est même lui qui en détiendra le record, trois fois en six mois.

A la seconde escale, à Grand-Bassam le P. Audebert déjà malade mourut et le Frère se trouva seul. Quand il apprit que le Père Bessieux était de passage en rade de Grand-Bassam, il était incapable de marcher. Les villageois le conduisirent en barque, qui chavira deux fois, deux fois le repêchèrent, et réussirent à le hisser au bord du paquebot. Il semblait mort. Quand il ouvrit les yeux, il reconnut le P. Bessieux, et tous deux se mirent à pleurer. Un an après leur départ de France, ils parvinrent au Gabon, c'était le 28 septembre 1844.

Deux ans plus tard, Grégoire revint à Dakar pour préparer sa profession religieuse, sous la conduite du Père Gravière. Devenu officiellement Frère Grégoire le 29 septembre 1846, il fut tenté de demander à revenir en France ; mais il retourna au Gabon jusqu'en 1857. Très fatigué, il était temps qu'il reprenne des forces en métropole. Hélas, il mourut d'épuisement avant d'atteindre l'escale de Dakar. C'est ainsi que le F. Grégoire alla jusqu'au bout "pour ne pas déplaire à Dieu".

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