Le Père Jean-Étienne WOZNIAK
PM 116 1985

tué dans une embuscade près de Malanje (Angola), le 26 mai 1985, à l'âge de 30 ans

Présenter Jean-Étienne WOZNIAK, qui aimait à se faire appeler " Yanesh " : prénom plus familier et plus caractéristique de ses origines polonaises, est à la fois facile, car son souvenir est encore très proche de nous, et difficile, car il a eu peu de temps pour réaliser ce qu'il portait en lui. J'évoquerai ici ce qui me semble avoir été l'âme de sa vie et le fil conducteur de sa vocation missionnaire.

Yanesh est né le 5 août 1955, à Firminy dans la Loire, de parents venus de Pologne pour travailler en France. Il vécut toute son enfance à Roche-la-Molière, près de Saint-Étienne, où son père était mineur. La foi et le courage de ses parents seront déterminants dans le choix de sa vocation.

A onze ans, il entre à Allex où il fera toutes ses études secondaires. A la fin de sa terminale, il écrivait : " Je suis entré à Allex avec l'intention de devenir missionnaire car quelque chose me disait que j'étais fait pour cela. "

A Vanves où il poursuit sa formation, on l'apprécie comme un garçon généreux et droit, facile à vivre. A ses yeux, la vie de communauté est très importante ; elle exercera d'ailleurs une grande influence sur son cheminement humain et spirituel. Trop jeune pour partir en coopération, on lui conseille une année de réflexion et de travail. Il en profite pour aller en Pologne à la recherche de ses origines et pour faire connaissance avec les membres de sa famille qui sont restés au pays.

En 1976, il part au Zaïre pour son stage missionnaire. On deviné à travers ses lettres de l'époque que tout ne lui a pas été facile. Néanmoins cette première expérience missionnaire sur la terrain et l'année de réflexion qui a suivi lui ont permis de mûrir son projet et de prendre davantage conscience du besoin d'apôtres solides et convaincus. En 1979, il entre au noviciat à Chevilly et prononce ses premiers voeux le 6 septembre de l'année suivante. Il choisit la vie religieuse et missionnaire dans la Congrégation parce que, écrit-il, il a vécu avec elle un certain nombre d'années et que ses exigences et les possibilités qui y sont offertes correspondent à ses aspirations profondes tant humaines que spirituelles.

Après le noviciat, il entame à Clamart la dernière étape de sa formation. On retrouve le Yanesh décrit plus haut. bien dans sa peau de jeune spiritain. Indépendant de tempérament certes, mais il ne refuse jamais le dialogue et sait se remettre en cause. Il apporte beaucoup à la communauté par sa bonne humeur, sa jovialité, sa vitalité débordante. Homme de relations, son rayonnement s'étend aussi auprès des jeunes qu'il retrouve en catéchèse au lycée Michelet de Vanves ou au club sportif de Clamart, ainsi que dans la paroisse Saint-Martin de Meudon où il fait son stage de diacre.

Yanesh est ordonné prêtre à Allex, le 25 juin 1983, par l'évêque de Valence, Monseigneur Marchand. L'année suivante, il reçoit sa première obédience pour l'Angola. Il sait que la mis-sion qu'on lui propose comporte des risques, néanmoins il accepte de s'engager avec réalisme et générosité. Il est affecté à Kiwaba Nzoji.

Les lettres et circulaires qu'il nous fait parvenir décrivent les conditions difficiles de son apostolat. En avril 1985, l'insécurité est telle que nos confrères sont obligés de quitter temporairement la mission et se replier sur Malanje. C'est en allant y célébrer la messe, le jour de la Pentecôte que lui et le Père John Kingston, qui l'accompagnait, tomberont dans une embuscade. La voiture est atteinte de plusieurs rafales de balles, Yanesh est mortellement blessé. Il décé-dera un peu plus tard. Peu de temps avant cet événement tragique, il nous écrivait : " C'est dans un quotidien tissé de peines et de joies, de vie et de mort, de luttes, d'espérance, de foi et d'amour que je découvre, chaque fois un peu plus. le sens de ma vie de prêtre, de mission-naire, mais aussi tout simplement ma vocation d'homme... Annoncer Jésus-Christ dans sa vie à des pauvres, c'est dur, mais c'est merveilleux. "

Grande a été la peine de tous ceux qui ont vécu et cheminé avec Yanesh, mais au-delà de la mort il nous encourage à aimer la vie et à aller jusqu'au bout de notre vocation spiritaine ou tout simplement de notre vocation d'homme.

Vent fou de la liberté, puissance de Dieu qui renverse nos choix, Vent fou, appel insensé, Sagesse de Dieu qui se dit par la croix. C'était le chant préféré de Yanesh. Il résume bien ce qu'il a été et le message qu'il nous laisse. Donner sa vie pour ceux que l'on aime, plus grand amour nul ne le peut. Comme l'ami s'offrant lui-même, veulent s'aimer les fous de Dieu.
Jean PEDRONO

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